Trop extravertie pour être patraque ?
Note à moi-même : être extravertie ne te rend pas invincible (et c'est ok)
Il est 19h20 lorsque je commence à écrire ce texte. Le vent apporte une touche de fraîcheur à l’air mexicain. Une femme, je crois que c’est une masseuse, discute avec l’homme accoudé à la réception. Derrière, des français (et oui, ça me saoule - je suis une touriste qui n’aime pas les… touristes, le comble). J’entends :
J’vais chercher Michel (no joke) pour l’apéro.
Le dîner est servi aux alentours de 20h. L’apéro, c’est précieux. L’apéro, c’est français. D’ailleurs, suis-je française ? Une autre discussion. Un autre moment. Un ailleurs.
J’avais envie d’écrire cette newsletter depuis une semaine. J’en crevais d’envie. Sortir mon ordinateur - et t’écrire. Et enfin, tout te dire.
Il y a une dizaine de jours, j’étais au Château des Entrepreneurs. Le fameux. Celui organisé par
et AliceCatDesigner. Je n’y étais pas pour chiller. J’étais là pour faire ce que je sais faire de mieux : transmettre et partager.Une présentation. Des slides alignées. Un léger maquillage (lol) et une quarantaine de personnes sérieuses et appliquées (et là, c’est pas ironique).
StoryAlchimie
Une formation que j’ai pensé et construite spécialement pour cet évènement. 1h pour construire son histoire de marque et enfin se différencier de la concurrence.
3 ateliers. Pour 3 groupes différents. Des sourires. Des prises de conscience. Et beaucoup (vraiment beaucoup) de remerciements.
Je suis aux anges. La journée se passe (bien). Et je finis par proposer un atelier (pas prévu) pour le lendemain matin. Une heure pour co-écrire tous ensemble. Avec un café (serré) et dans la joie et la bonne humeur.
22h, je file me coucher. Oui, la vieille, c’est moi. Couchée à 22h. Levée à 7h.
Enfin, c’est ce que je croyais.
Le lendemain, patatras…
Je suis réveillée par une sorte de boule d’anxiété. Je file dans la salle d’eau pensant faire une crise d’angoisse. Un Xanax. Hop. Avalé. Et là, j’ai envie de vomir. Je me rue sur les toilettes. Et ça rate pas. Je sors des toilettes honteuses. Alice et Laurine sont réveillées. Et déjà, je lance : “Désolée.”
Mais qu’est-ce que tu racontes ? C’est rien ! T’excuse pas pour ça.
Elles sont a-do-ra-bles. Je me justifie :
Je crois que je fais une crise d’angoisse. Parfois, quand c’est trop violent, j’ai besoin de vomir.
Elles me rassurent. Nous décidons de descendre. Silence dans notre gîte d’exception. Très peu sont les réveillés. J’essaye de descendre et là… J’ai encore envie de vomir. Puis, c’est la diarrhée. Ça ne s’arrête pas (et je t’épargne les détails). Je me sens mal.
J’appelle ma mère. J’ai besoin qu’elle me rassure. Je suis malade. Loin de chez moi. Et dans le cadre du travail. Elle pense que je fais une crise d’angoisse. Moi aussi. Même si ça ressemble plus à une allergie, une intoxication ou pire, une gastro. Elle me sormone :
T’as oublié de prendre tes anti-depresseurs ces deux derniers jours. On en a déjà discuté. Tu sais que ça peut te rendre réellement malade.
La maladie mentale, c’est comme le poids : dès que quelque chose ne va pas, on l’accuse. Mal de dos ? Ton poids. Mal de ventre ? Ta folie. Mal de tête ? Ta folie. Encore. Mal de dents ? Ton poids.
Et le pire, c’est que moi aussi, je finis par y croire.
Je vis avec l’anxiété depuis tellement longtemps que je confonds les symptômes de maladie “courante” avec de l’anxiété.
La preuve ? C’est seulement après 1h de souffrance que j’ai compris que je ne faisais pas une crise d’angoisse. Mon corps rejetait quelque chose que j’avais mangé. Et qui ne passait pas.
Laurine me propose d’aller me coucher. Il est 8h. Je n’émergerai qu’à partir de 16h. J’ai froid. J’ai chaud. J’ai des frissons. J’ai soif. Je vomis à m’en étouffer. Et mes intestins me font mal.
Je suis malade. Et c’est pas la tête.
Place à la culpabilité
Je suis extravertie. Je prends de la place. Je déborde. Je suis neuro-atypique. Je ne sais pas respecter les conventions sociales. Je les brave. Tout l’temps. Je manque d’organisation (c’est après 4 ans d’entrepreneuriat que j’ai commencé à créer des process… puis, c’est de venu une obsession, maintenant j’en crée pour tout et n’importe quoi, YAY !) et j’ai la tête en l’air.
Par contre, je suis une excellente professionnelle. Je suis sûre de moi sur ce coup : mon travail est qualitatif, sérieux. Et mes clientes sont TOU-JOURS satisfaites.
Je me mets une pression pas possible pour mon travail.
Parce que je suis extravertie, fofolle, une vraie rigolote, je veux, je dois prouver que je suis sérieuse. Et que je ne suis pas qu’un clown. Que l’humour, les détails sordides et les body transparents ne font pas de moi une meuf incompétente, juste là pour taper des barres de rire.
Ça a toujours été pareil.
le disait. me le dit : je sur-délivre. Et si je sur-délivre, c’est parce que j’ai peur et que j’ai besoin de (me) prouver que j’en vaux le coup et que mon extraversion n’impacte pas mes capacités à transmettre et à coacher.Alors, quand je me suis retrouvée au lit, incapable de bouger. J’ai commencé à paniquer.
Je panique de ce que les gens vont penser de moi : “Jasmine, n’est pas quelqu’un de confiance.” “C’est une rigolote qui n’a que pour but de faire rire.” “Elle manque de professionnalisme.”
Je ne cesse de m’excuser. Par-don. Par-don. Je suis vraiment désolée.
Parce que je suis extravertie, je n’ai pas le droit à l’erreur
Qu’on s’entende bien : être malade, n’est pas une erreur. Cependant, mon extraversion m’empêche les coups de mou.
J’ai peur de ne jamais être assez. Parce que je suis trop. Trop grande gueule, trop drôle, trop grosse, trop tatouée, trop percée, trop bavarde. Je suis trop.
Alors, quand je travaille, je dois être tout sauf trop. Les seuls trop que je puisse être, c’est trop efficace, trop professionnelle, trop experte. Pas trop malade.
Cette prise de conscience, je l’ai eu au fond de mon lit. Dans le château. Je ne cessais de penser “mais qu’est-ce qu’ils vont penser de moi ? Est-ce qu’ils m’en veulent ?”. Et j’ai enfin réussi à verbaliser : ma personnalité extravertie m’interdit d’avoir des coups de mou, d’être en retard ou d’être malade. Parce qu’une seules de ces problématiques pourrait donner raison aux préjugés sur moi : Jasmine n’est pas professionnelle.
Je demande à Anne-Cha : “Tu penses qu’elles m’en veulent ?”. Elle me rassure : “Mais non ! N’importe quoi !”
Et malgré tous les mots doux, tous les retours positifs et les sourires : je culpabilise. J’ai échoué.
Je n’ai pas de conclusion pour cette newsletter. Désolée.
La prise de conscience est une chose importante, mais elle n’implique pas de résolution immédiate. Je ne me sens pas plus légitime à être malade et/ou patraque. J’ai juste mis le doigt sur une problématique qui touche pas mal d’extravertie.
Maintenant, à moi de faire le taf.
Ps : Moi, avec l’aide de mon psy, bien-sûr !
J’ai adoré lire cette newsletter Jasmine.
Je me demande si ça a vraiment à voir avec l’extraversion, ou si l’extraversion n’est pas un simple prétexte que ton cerveau prend pour justifier sa peur d’être trop ou pas assez. Dans le sens où si tu étais introvertie, il se dirait p-ê la même chose : mon introversion m’interdit d’être malade car je ne suis pas assez.
Qu’en penses-tu ?
En tous cas c’est comme ça que mon cerveau me joue des tours.
Mes réflexions personnelles du moment tournent aussi beaucoup autour d’être trop ou pas assez (rapport à mon cyber harcèlement, entre autres) et j’ai trouvé un exercice qui m’apaise beaucoup :
- lister toutes les choses où je pense être trop ou pas assez
- pour chacune, développer un argumentaire sincère d’acceptation que je suis pile ce qu’il faut, que tout m’a menée à celle que je suis aujourd’hui et accepter que c’est ma réalité actuelle, plutôt que de se projeter dans une réalité différente qui n’existe que dans notre imagination.
Ex :
- je suis trop extravertie
-> j’accepte de parler fort et d’attirer l’attention, je sais que c’est le fruit de mes expériences, de mon tdah, et j’accepte de prendre cette place, qui est pile la bonne taille. Je suis reconnaissante de pouvoir m’exprimer fort et au fond j’adore me rendre visible.
Ps : on t’aime pile comme tu es 🫶🏽
Bises 😘